Marie Yvette Lefčvre : ''Des filles s'attrappaient de gros bonnets''
Postée le 17-02-2014 / 4027 Vues

• Comment es-tu arrivée dans ce métier ?


- Je dois dire que c’est un peu par hasard hein ! Odile Pépé, ma sœur était déjà dans le milieu. Elle était hôtesse d’accueil dans l’agence Emergence de Brigitte Ajavon qui était à l’époque la seule à Abidjan. Moi, je suis arrivée comme ça par hasard parce qu’on trouvait que j’étais grande, mince, etc. taillée pour le métier. J’étais toute jeune, étudiante et j’ai commencé par des prestations d’hôtesse. Et de fil en aiguille, je suis arrivée au mannequinat avec Etienne Marcel. Je participais à des castings et quand ça marchait, je défilais. Mais ce n’était pas mon activité principale puisque j’étais prof de français dans les lycées et collèges. J’étais dans le mannequinat par plaisir et puis comme, on le dit, ça mettait du beurre dans les épinards (rire).


• Et pourquoi es-tu partie ?


- C’était un peu p ar obligation familiale. J’ai rejoint mon fiancé qui était à l’époque en Italie. Nous avions un enfant, et donc, je l’ai suivi. Voilà !


• Qui es-tu aujourd’hui ?


- Je suis madame Marie Yvette Lefèvre. J’ai trois enfants. Je vis à Nancy en France depuis 15 ans. Après avoir touché à de petits métiers, j’essaie de me lancer dans le mannequinat et la mode en général. Je fais la promotion du wax dans la région de Lorraine (Nord-Est de la France).  Je crée des vêtements mais comme je ne suis pas créatrice au départ, alors je travaille surtout sur les accessoires comme les chaussures, les sacs à main, les ceintures, les chapeaux… J’organise aussi des défilés, à la suite desquels je fais des cocktails et des ventes privées. Et les gens ont l’air d’aimer. C’est vrai que le pagne wax avec ses couleurs vives n’accrochait pas. Je fais donc le tri dans les tissus et surtout dans les motifs en rapport avec les goûts de mon public, constitué d’Européens en majorité. Avec eux, les couleurs vives et les gros motifs, ça ne passe pas. Je fais donc les achats de pagne en Afrique avec des choix que je veux. J’ai même monté ma petite entreprise qui s’appelle aXessoirement WAX. Je travaille chez moi à la maison et ça commence à prendre de l’ampleur.


• A votre époque, on vivait peut-être du mannequinat. Mais aujourd’hui, c’est pratiquement un défilé tous les six mois en Côte d’Ivoire avec des cachets au rabais…


- C’est vraiment dommage. Mais le but du mannequinat, c’est de mettre les vêtements en valeur. Dans le temps, le but premier n’était pas de se faire de l’argent même si on était bien payées. On défilait par plaisir de le faire mais on joignait aussi l’utile à l’agréable avec nos jolis cachets (rires). Abidjan était la plaque tournante de la mode. Tout le monde venait là : Chris Seydou, Alphadi… Dans la coiffure, il y avait Garo Hasbanian qui était à Abidjan. On a beaucoup défilé pour lui. Ce sont des gens qui payaient bien. J’ai été hôtesse avec Emergence, c’était des cachets allant de 80 à 100 000 FCFA une soirée. Aujourd’hui, on me parle de


10 000, 15 000 FCFA. Et quand c’était pour un concessionnaire avec une nouvelle voiture, waouh, on était gâtées !


• Pour beaucoup, le mannequinat est une bouche à prostitution, les filles y vont pour se vendre… Qu’en penses-tu ?


- C’est dommage que ce soit vu comme ça en Afrique. Imaginez une gamine qui commence le mannequinat ici en Afrique et qui est récupérée par une agence en Europe, toute sa vie va changer.


• Mais c’est tellement rare les filles qui quittent l’Afrique pour réussir dans le mannequinat en Europe…. On se dit qu’après un défilé, les filles sont accostées par de gros bonnets…


- Cela a toujours existé. Ce n’est pas nouveau. Je voyais des filles qui partaient après les défilés avec de gros bonnets qui étaient dans la salle. Maintenant, disons que tout cela dépend de la moralité de la fille. Il faut savoir ce qu’on veut. Il y en a qui sont dedans mais qui sont mariées ou alors qui vivent en couple mais c’est vraiment sérieux. Quand on mène une vie comme celle-là, après un défilé, tu ne vas pas de gauche à droite.


• Tu es casée, tu as trois enfants. Donc quand on est mannequin, on peut se marier ?


- Bien sûr ! Ce sont des préjugés qui disent que les mannequins ne se marient pas.


• C’est pas totalement faux car sur la place, les exemples sont légions…


- (Rires aux éclats). C’est comme ça, c’est la vie ! Même si on a eu une bonne et longue carrière, il faut savoir ce qu’on veut. Car la finalité pour une femme, c’est de se marier et avoir des enfants. Maintenant si on veut passer sa vie à sortir avec les gros bonnets comme vous le dites, finalement on passe de bonnet en bonnet et puis un jour, on se retrouve sur le carreau.


 


Par Omar Abdel Kader

Source : Top Visages
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