José DuBonheur : Pourquoi il a voulu s'immoler ?
Postée le 27-03-2015 / 1074 Vues

En 2010, après le premier tour de l’élection présidentielle en Côte d’Ivoire, José Dubonheur  est convié à participer aux arrangements du dernier album de la chanteuse Kandet Kanté, en Guinée, dans le studio de Mory Kanté.


Mais la situation politique au pays se dégrade et une fois le travail terminé, l’artiste se retrouve dans l’impossibilité de revenir en Côte d’Ivoire. Sans le vouloir, il finit par passer trois ans en Guinée avant de pouvoir enfin rentrer par l’intermédiaire du HCR.


«Ce n’était pas facile pour nous tous là-bas. Je n’avais jamais prévu y faire tout ce temps. Beaucoup de gens pensent que j’ai fui, mais ils ne savent pas ce que j’ai pu endurer avant de pouvoir revenir chez moi avec toutes les difficultés du monde», dit-il .


Après avoir pris le pouls du pays, il signale sa présence au Bureau Ivoirien du Droit d’Auteur et renouvelle sa carte de membre (qu’il avait perdue), pour pouvoir percevoir ses droits d’auteur échelonnés sur douze répartitions.


«J’ai demandé au directeur de la répartition de me faire le point. Jusque-là ça tardait. D’abord pour me renouveler ma carte, cela a pris trois mois. Et après on est rentré en début 2014. Le premier trimestre, je n’ai pas été convié aux répartitions, mais au deuxième trimestre, si. Là, j’ai reçu une somme qui ne valait même pas 50 000 Franc CFA. Je suis reparti voir le responsable des répartitions qui avait promis qu’une fois que je serai à jour, on me ferait un bon point financier, mais rien. Il m’a répondu que ce n’est pas facile, m’a demandé de patienter parce que c’est tout un dossier et qu’il faut fouiller par ci par là». 


L’attente est longue pour le chanteur arrangeur qui perçoit de temps à autres 17 000, 28 000 francs Cfa, selon ses dires. Puis, il commence à mettre la pression, mais ne trouve aucun interlocuteur pour résoudre son problème.


«Le temps pressait et mes conditions de vie se dégradaient. Au fil des jours, je me dépouillais de tout ce qui me restait. Je suis donc reparti au Burida en fin d’année 2014 pour les répartitions des droits d’exécutions publiques. On m’a déclaré près de 300 mille Francs CFA et sur le champ, il m’a été demandé de payer l’assurance. Pour quelqu’un qui a fait des années hors du pays, qui ne ren-tre pas dans ses fonds et qui reçoit, un an après son arrivée, environ 300 mille Francs CFA avec toutes les dettes qu’il a, il y a encore une affaire d’assurance ? Finalement, je me suis retrouvé avec 217 mille francs».


Dubonheur décide donc de ne plus se rendre aux répartitions et se plaint à nouveau au responsable : «Je vois tous les artistes que j’ai arrangés venir au Burida et s’en sortir convenablement, je ne comprends pas, ça commence à me brûler le cœur et je crois que je vais t’attaquer sur un autre front, en expliquant à la nation ce que je vis».


Mais selon Dubonheur, la réponse singlante de son interlocuteur lui fait monter la moutarde au nez : «Va où tu veux. Vous avez fui le pays quand ça chauffait, laissez ceux qui sont restés manger aussi».


Quelques jours après un spectacle organisé le 1er mars 2015, avec ses musiciens, le chanteur musicien arrangeur n’arrive toujours pas à se défaire de ces propos qui le choquent. Il se rend au Burida, déverse de l’essence sur lui et tente de se mettre le feu. N’eût été l’intervention de l’artiste Kusthala et quelques autres personnes, le pire serait peut-être arrivé.


«C’est vrai, que j’ai donné le mauvais exemple par ce geste, mais, parfois, le désespoir pousse à bout. Il y a trop de plaintes autour des répartitions et chaque fois qu’on fait des réclamations, on dit que nous sommes des drogués, des alcooliques… On dit que je ne suis pas très productif en ce qui concerne mes albums, mes tournées mais j’ai fait quand même des arrangements et non des moindres, Espoir 2000, Molière, Fadal Dey, Jim Kamson, Aboutou Roots… Nous savons combien on récolte un peu partout où les œuvres sont jouées, mais nous ne savons pas sur quelle base nous sommes répartis. Les administrateurs qui sont là-bas doivent réfléchir artiste. Les CD ne se vendent plus. Il y a par contre beaucoup d’exécutions publiques et les gens payent correctement. Alors, où est le problème ?  Nous voyons des personnes en stage au Burida qui roulent des voitures que nous autres, artistes ne pouvons pas avoir. Faisons attention !», conclut-il.


stéphie Joyce

Source : topvisages.net
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